Ainsi d'un si

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Et si l’espace d’une seconde, vous reviviez votre vie entière. Les mêmes choix, les mêmes erreurs, les mêmes peines pour les mêmes sourires.

Et si l’arc en ciel à votre fenêtre était venu pour vous, comme le sourire de l’aube vous souhaitant bonne journée. Et dans vos yeux son reflet tout le jour, gravé sur l’iris, rivé dans ceux des autres. Votre visage, leur fenêtre.

Et si la nuit devenait jour, l’absence d’un père l’amour d’une mère, et si vos soucis courbaient l’échine en un escalier qui vous élève, la peur deviendrait le vent de poupe qui gonfle vos poumons. Votre air, votre hymne.

Et si chaque jour, le 5 se transformait en 10. L’éternelle fatigue muée en ivresse d’une vie reposée.

Et si cet air sifflé chaque matin, vous arrachait ce poids qui vous ancre, l’accrochant au ciel pour qu’un clin d’œil au soir puisse le gratifier d’un adieu.

Et si ces mots refaisaient vraiment le monde. Paris en bouteille, quelques arbres et merveilles. Quelques arbres, une bouteille, paris qui en sort, la bouteille qui éclate, et ses éclats comme tant d’écailles d’une terre qui vous rappelle que si proche soit l’image, un regard peut la briser.

Ce regard en arrière, et vous vous revoyez, médecin, pompier, les billets dans une main, la chair dans l’autre, puis devant vous : le soleil. Dans vos mains, une clope et une bouteille. Alors que vous expirez, la réalité se déforme, et l’instant d’une seconde, vous vous demandez si ça n’est pas Paris que vous noyez.

Le soleil se couche, la nuit passe et tout empire, cette ombre vous agresse, la lune vous traque, sa lueur si proche du projecteur. Elle voit tout, vous avez peur. Vous vous cachez, pour vous rendre compte que c’est vous qui voyez tout. Vous vous voyez, tremblant sous votre couverture de mensonges. Et vous pleurez.

Puis l’aube arrive, et vous êtes toujours là, le soleil se levant. Vous regardez derrière, et vous rendez compte que vos traces sont doubles. Blâmant l’alcool, vous dressez votre dextre, pour la retrouver double elle aussi. Tant de doigts ? Vous regardez alors à côté, et croisez son regard.

Alors, vous vous souvenez. Et si c’était d’y croire ?

Et si l’espace d’une seconde, vous reviviez votre vie, entière. Les même choix, les même erreurs, les mêmes peines pour les mêmes sourires ?

Alors cette seconde s’écoulerait inchangée, car cette fumée que vous expirez maintenant ne déforme pas ce regard qui vous dénude.

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